Je m’appelle Maryline, je suis Française et escort à Paris depuis Janvier 2015.
J’ai tout de suite compris que ce que j’allais voir, entendre et expérimenter, allait rapidement m’atteindre et transformer ma vision du monde tel que je le connaissais jusqu’ici.
Je ne pouvais cependant imaginer à quel point.
Assez rapidement, j’ai ressenti le besoin de garder un souvenir de ce que je venais de vivre et de l’homme qui me l’avait demandé. J’ai pris des photos, il fallait être rapide pour ne pas que le client change d’avis, c’était un cadrage spontané, sans mise en scène, je voulais être la plus juste et honnête possible sans y mettre d’affect. Juste figer la scène, figer cet homme, sa position, son regard et l’emprisonner à jamais dans ce cadre blanc, avoir un trophée de ça, un témoignage visuel ; celui de l’écrasement d’un homme par sa soif de plaisir immédiat.
J’ai commencé à tout archiver, chaque passe, chaque client, chaque appel, textos, mail, lettres de certains de mes clients.
On pourrait sans doute dire de moi que je suis obsessionnelle et monomaniaque, je suis une addict donc ce serait juste, et j’ai pu dans la prostitution lui offrir un superbe terrain et lui donner du corps.
La prostitution te prend tout.
Ta vie d’avant, ton corps, ton temps, tes sentiments.
Elle te prend tout tes repères, tout ce que tu as appris du bien et du mal, du vrai et du faux, du convenable, du moral et du normal.
Quand on devient escorte, on ne se rend pas tout de suite compte qu’en vendant son corps, c’est son âme qu’on vend d’abord.
On se sent toute puissante, on pense prendre le contrôle de sa vie mais on sera encrassée par ces souvenirs de corps à jamais.
Ce métier donne accès à quelque chose d’unique, il fait de moi la témoin privilégiée du tabou, du caché, de l’inavoué…
Mais à quel prix?!
Triste spectacle, l’homme au masculin n’a plus rien de grand, rien de fort, rien à admirer…
Je ne suis pas domina, je ne fréquente pas le milieu SM.
Je ne suis pas anti-mec. Je ne suis ni libertaire, ni activiste.
Je ne suis pas athée, pas agnostique je ne soutiens aucune cause.
Ce sont toutes ces années de travail, ces plusieurs milliers de corps, tout ce torchis humain qui ont donné naissance à
Bienvenue dans son Enfer